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Le diagramme montre les différences dans le niveau des taux d’intérêt. Toutefois, on peut éga- lement observer de nombreux parallèles dans les hauts et les bas (c’est-à-dire dans la politique des taux d’intérêt des banques nationales). Par exemple, jusqu’en 2009, le taux d’intérêt du yen japonais était le plus bas, alors que depuis 2009, le taux d’intérêt du franc suisse est le plus bas. Depuis le début de l’année 2015, il se situe autour de –0,75 % : le taux d’intérêt est négatif. En raison de l’augmentation du renchérissement, la BNS l’a progressivement relevé jusqu’à 1,75 % (situation en mars 2024).

Le principe de l’intérêt négatif

Normalement, vous obtenez un rendement pour un crédit sur un compte bancaire. Cela dépend du taux d’intérêt en vigueur : plus le taux d’intérêt est élevé, plus le rendement est important.

Comme le montre le diagramme, la BNS a fixé le taux d’intérêt à trois mois à environ –0,75 % par an depuis 2015. Cela signifie que 0,75 % de toutes les banques qui ont un solde créditeur auprès de la BNS seront déduites de leur solde chaque année. Au lieu d’un rendement, elles subissent une perte sur leurs avoirs auprès de la BNS. En 2017–2018, la BNS a ainsi collecté en moyenne 2 milliards de francs par an. En outre, le taux d’intérêt négatif affecte également les titulaires de soldes créditeurs auprès des banques. Il peut s’agir d’autres banques, de grandes entreprises, de l’État (Confédération, cantons, communes) ou de caisses de pension. La principale préoccupation de la BNS était l’évolution du cours de change du franc suisse. Au cours des 45 dernières années, le franc suisse s’est apprécié par rapport à toutes les autres de- vises (voir graphique p. 293), tant en termes nominaux que réels. La conséquence positive de cette évolution a été la baisse des prix des biens importés. En revanche, l’augmentation du prix des produits suisses à l’exportation par rapport aux concurrents étrangers est une source d’in- quiétude. C’est pourquoi la BNS a introduit un taux plancher de 1,20 franc par euro en septembre 2011. Elle soulignait alors qu’il s’agissait d’une solution transitoire, en attendant de revenir à un taux de change déterminé par le marché. C’est ce qu’elle a fait en janvier 2015. À cette époque, il était prévisible que le franc se renforce immédiatement si le taux de change était laissé flottant. Pendant une courte période, le franc s’est même retrouvé à parité avec l’euro. Afin d’éviter une telle appréciation, qui aurait sensible- ment affaibli les secteurs de l’exportation et du tourisme dans la concurrence internationale et augmenté le chômage, la BNS a introduit des taux d’intérêt négatifs dès le début de 2015. L’effet a été de réduire l’attractivité du franc suisse en tant que monnaie de placement, et donc de réduire les volumes d’achat. Les désavantages sont évidents : l’argent devient trop bon marché et le taux d’intérêt ne peut que partiellement remplir l’objectif d’orienter les capitaux à court et à long terme vers les utilisa- tions les plus productives. L’une des conséquences est l’envolée des prix de l’immobilier, car les hypothèques sont devenues très bon marché. En outre, les taux d’intérêt négatifs pèsent sur les banques, les grandes entreprises et les caisses de pension, qui sont obligées d’investir l’argent de manière plus risquée (notamment en actions) afin d’obtenir un rendement suffisant. Il s’en est suivi un boom boursier. En 2020, la pandémie de coronavirus a déclenché une récession mondiale. La politique monétaire est restée partout généreuse (expansive). Jusqu’en mars 2022, les banques centrales ont réagi différemment à la reprise conjoncturelle qui s’est amorcée dans le monde entier depuis 2021 et à la hausse du renchérissement : aux États-Unis, les taux directeurs déjà positifs ont été prudem- ment relevés, tandis qu’ils sont restés inchangés et négatifs dans la zone euro et en Suisse. Le dilemme de la politique monétaire est que le renchérissement ne peut être combattu qu’avec des taux d’intérêt plus élevés, ce qui freine l’activité économique. Compte tenu de la situation mondiale incertaine au printemps 2022, les banques centrales européennes attendent donc avant d’augmenter les taux d’intérêt. Le taux d’inflation ayant dépassé la valeur cible maximale de 2,0 % en février 2022 et atteint 3,5 % en août, la BNS a dû intervenir. Elle a progressivement relevé le taux d’intérêt à trois mois jusqu’à 1,75 % en juin 2023. Il n’est pas possible, à l’heure actuelle (mars 2024), de savoir si cela suffira à ramener durablement le taux d’inflation dans la fourchette cible.

Pourquoi la BNS a introduit des taux d’intérêt négatifs

Pourquoi la BNS a abandonné les taux d’intérêt négatifs en 2022

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